Véritable référence pour les consommateurs, le label européen AOP (Appellation d’Origine Protégée) est le gage d’un savoir-faire reconnu de nos régions. Contrairement aux fromages et aux vins, qui en compte une centaine, il n’y a que 4 viandes bovines françaises qui portent cette appellation. Parmi elles, l’AOP Maine-Anjou provenant de la race Rouge des prés. Nous avons rencontré David Cadet, président de la filière AOP Maine-Anjou et éleveur de Rouge des prés en Mayenne.
La race bovine Maine-Anjou est issue d’un croisement entre une race anglaise : la Durham et une ancienne race locale des Pays de la Loire : la Mancelle. Elle vit le jour en 1908 précisément au Domaine des Rues à Chenillé-Changé (49), où fut également fondée la société des éleveurs de Maine-Anjou qui y réside encore aujourd’hui.
Considérée comme une race laitière dans ses premières années, elle changea rapidement d’orientation avec l’arrivée d’une concurrente possédant un gros potentiel laitier : la Holstein. Ne pouvant rivaliser, l’organisme de défense et de gestion de la race prit la décision de la reclasser en race à viande. « A l’époque, elle commençait déjà à être reconnue pour son persillé et ses qualités bouchères. »
En 2003, les éleveurs commencèrent les démarches pour créer l’AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) Maine-Anjou auprès de l’INAO (Institut National de l’Origine et de la Qualité). Cependant, une AOC ne peut porter le même nom qu’une race, « les éleveurs la rebaptisèrent spontanément Rouge des Prés car elle a une prédominance rouge dans sa robe et elle valorise principalement les prairies. » Ainsi, la race obtint son AOC en 2004 et quelques années plus tard, en 2011, sa reconnaissance européenne en AOP Maine-Anjou. « Pour qu’il n’y ait pas de confusion, dans les prairies on retrouve la race Rouge des Prés tandis que dans l’assiette, on parlera de l’AOP Maine-Anjou. »
De nos jours, la filière AOP Maine-Anjou regroupe 70 éleveurs et compte environ 40 000 Rouges des prés sur tout le territoire français, dont 80% résidents en Pays de la Loire. La zone géographique étant l’un des critères figurant dans le cahier des charges de l’AOP. » Les bêtes doivent être nées, élevées, engraissées et abattues dans l’aire géographique définie. » En clair, dans cette zone les « Rouges des Prés » sont labellisées AOP Maine-Anjou et dans les autres régions elles ne sont que « Rouges des Prés ».
Les animaux de cette espèce sont facilement reconnaissables par le cœur blanc présent sur leur front et leur gros gabarit. « Les bœufs et les taureaux peuvent atteindre 1,70 mètre et 1,80 mètre au garrot. On les retrouve généralement parmi les plus lourdes au salon de l’agriculture ». Elle se différencie également des autres races par sa facilité d’élevage, grâce à son caractère plutôt calme et surtout par sa capacité à valoriser les grandes pâtures en s’adaptant – par exemple – aux sécheresses l’été. En effet, la Rouge des prés a besoin de grands espaces pour se nourrir. « En AOP, on est limité au niveau des prairies, il faut que l’on ait une vache par hectare. » Elles passent ainsi entre 8 et 9 mois de l’année au grand air à manger de l’herbe et sont abritées en hiver.
Le temps d’élevage jusqu’à l’abattage dépend de l’éleveur et de l’animal, mais la mise en engraissement doit être signalée deux mois avant à l’abattoir. Durant la période de finition, en plus d’une alimentation à base d’herbe, les animaux reçoivent des compléments énergétiques et protéiques composés d’au moins trois matières premières. « Pour être validés en AOP, seuls les animaux de plus de 350 kilos de carcasses et ayant vêlé au moins une fois et âgés de moins de 10 ans pour les femelles et plus de 400 kilos et âgés de plus de 30 mois pour les bœufs peuvent prétendre à l’AOP. »
Celle que l’on surnomme la star de l’Anjou doit sa réputation à la qualité de sa viande, très appréciée des consommateurs. « Elle possède un persillé bien prononcé qui lui confère une saveur intense. Cuite, elle se caractérise par la tendreté et la jutosité présentes à chaque bouchée ».
Néanmoins, la viande n’est certifiée AOP qu’après un examen approfondi et réalisé par des agents formés et agréés par l’INAO. « La carcasse est découpée entre la 8ème et la 9ème côte. La couleur, le niveau de persillé et la tendreté sont évalués à l’abattoir. » En moyenne, il y a entre 5% et 8% de bêtes par an qui sont déclassées principalement pour le gras. « Lorsqu’une bête est refusée à l’AOP, elle sera vendue en tant que Rouge des Prés. » Autant de critères réunis, qui, associés à la volonté des éleveurs de préserver la race, permettent à l’AOP Maine-Anjou de perdurer.